A chaque société sa culture, ses spécificités, et son lot de tabous. Et la société marocaine ne déroge pas à la règle, surtout quand il s’agit d’un sujet aussi brûlant que celui de l’égalité homme-femme. Cette problématique oppose deux visions du monde, deux approches de la vie, presque deux peuples. Le camp de ceux pour qui le progrès est ce qu’il y a de plus naturel, qui ne doit être l’objet d’aucun complexe que ce soit. Et le camp de ceux que l’idée de progrès révulse, au point d’y voir les raisons d’une décadence annoncée, jetant l’oppobre sur ce qui reste de notre héritage conservateur.
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Madame Lamrabet a depuis longtemps choisi le sien. Elle est de ceux qui n’hésitent plus à prôner le progrès. Non contente de se risquer à aller à contre courant dans un pays qui ne le permet qu’à demi-mot, elle le fait à la Rabita almohamadya des Oulémas du Maroc, plus précisément au Centre des études féminines en Islam, depuis 2011. Elle aura dû, 8 ans durant, y encaisser critiques et insultes pour ses positions dissidentes sur l’héritage islamique.
Ces dernières années, nombre d’intellectuels marocains ont pris position en faveur de l’égalité homme-femme en matière d’héritage. Cet élan de progressisme n’a pas été du goût des conservateurs au pouvoir. Sans doute doivent-ils craindre l’impact de cette question polémique sur une société peu encline à débattre lorsqu’il s’agit des femmes. A s’en demander, en feignant d’ignorer la réponse, s’ils ont peur de choquer ou d’instruire.
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Toujours est-il que l’annonce de sa démission a été faite sur Twitter : «J’ai présenté ma démission de la Rabita almohamadya des Oulémas du Maroc. Une étape est finie…». Un départ annoncé tout en sobriété, mais non exempt de problématiques importantes qu’il porte en lui même.
Si le sujet n’est pas de trancher sur la question de l’égalité homme-femme dans l’héritage islamique, n’est-il pas honteux de ne pas permettre que le débat puisse se poser ? N’est-ce pas le pire message à envoyer à la société que d’instaurer une omerta sur un sujet aussi fondamental ? Est-il normal qu’en 2018 il soit banal de bafouer aussi délibérément le plus simple des droits, qui est celui de la liberté d’expression ?
Drôle de conception du débat public, drôle d’approche du désaccord. Toutefois, s’il est une chose dont on est bien sûrs, c’est que la réponse à la question « Qui a perdu dans cette histoire ? », c’est qu’à jamais, c’est le peuple qui trinque.
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