Vous voulez savoir comment on motive un médecin à travailler honnêtement, avec sérieux et dévouement au Maroc ?
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En mettant à sa disposition les moyens matériels pour exercer son métier ? En saluant son travail ? En le félicitant ? En l’aidant à exercer dans les meilleures conditions possibles ? En facilitant la prise en charge de ses patients ?
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Non, ici, il semblerait qu’on le motive en le poussant à bout, en boycottant son travail, en l’empêchant de voir ses patients et de réaliser ses consultations médicales, en le laissant travailler dans des conditions atroces, en le harcelant moralement, en lui mettant la pression et en lui faisant vivre un enfer jusqu’à ce que la démission devienne sa seule et unique issue.
Vous l’aurez compris, il semblerait qu’au Maroc, un médecin qui travaille honnêtement et fait tout son possible pour aider ses patients n’est pas motivé, il est détruit.
C’est du moins ce que beaucoup retiennent de l’histoire de Dr Mehdi Echafi, 34 ans, chirurgien pédiatre au Centre Hospitalier Provincial (CHP) de Tiznit. Surnommé « chirurgien des pauvres », son histoire ne laisse personne indifférent. Et pour cause, elle est au centre d’une vive polémique depuis un bon bout de temps déjà.
Dr. Mehdi Echafi est l’un des seuls à avoir levé la voix pour dénoncer une réalité terrible dont sont victimes les médecins marocains.
Il incarne aujourd’hui une nouvelle génération de médecins, fraîchement diplômés, motivés et prêts à lutter pour améliorer la situation sanitaire de leur pays et pour aider les patients. Il incarne cette jeunesse, dans la fleur de l’âge, non seulement déçue par la triste réalité, mais surtout enchaînée, prisonnière et victime d’un système de santé terriblement défaillant, souffrant d’un retard effroyable et d’anomalies insoutenables qui semblent passer inaperçues auprès des responsables.
Pire encore, le médecin est celui qui est toujours pointé du doigt en 1er par la société civile, lors du moindre incident, sans prêter attention à ce que celui-ci subit. Sans se renseigner et sans chercher à comprendre l’origine des lacunes, beaucoup rangent le médecin marocain dans la case des coupables, alors qu’il est lui-même victime de la défaillance du système de santé, des « conditions de travail lamentables” , du « manque criant de matériel chirurgical” et de « la corruption« .
Aujourd’hui à bout, accusé de diffamation, « le chirurgien des pauvres » a déposé sa lettre de démission il y a quelques jours.
Pour le soutenir, nombreux sont les internautes qui ont partagé ce résumé de son histoire, retraçant un parcours irréprochable, copié de Twitter via @donilapute :
1- Il était une fois , un jeune étudiant qui rêvait d'être médecin pour soigner ses concitoyens et apporter quelque chose à son pays pic.twitter.com/w8r2j6GrZx
— doni (@donilapute) July 24, 2018
2- Alors il bossait , il bossait , il a tout sacrifié pour réaliser son rêve, il étudiait nuit et jour , il avait même largué sa copine pour arriver à son objectif pic.twitter.com/QYnlAcPLQr
— doni (@donilapute) July 24, 2018
3- Puis le rêve se réalisa, à force de travail et de persévérance, il est maintenant chirurgien , avec même son propre bureau la vie est belle pic.twitter.com/Qj3fRuauvt
— doni (@donilapute) July 24, 2018
4 – Tout l'hôpital se demande qui est ce jeune médecin, allure d'acteur de cinéma, les infirmières veulent tout savoir, ça discute, ça papote , le sujet n°1 , C'est lui pic.twitter.com/CqJN0M7w1P
— doni (@donilapute) July 24, 2018
5- Le médecin lui il est dans son bain , il est devenu pédiatre, donne du sourire aux enfants et tout lui sourit pic.twitter.com/lbB3hFliWc
— doni (@donilapute) July 24, 2018
6 – le jeune pédiatre doit travailler sous les ordres de son supérieur, le grand médecin chef , un vieux de la vieille comme on dit pic.twitter.com/v2LjDmTaEF
— doni (@donilapute) July 24, 2018
7- le pédiatre opère nuit et jour , il dort pas , il est motivé, il veut soigner tous les enfants du monde , C'est sa mission il en est convaincu pic.twitter.com/MZWh99hzmZ
— doni (@donilapute) July 24, 2018
8- Le rythme du travail du jeune médecin commence à déranger les infirmières, elles n'ont pas l'habitude de bosser jusqu'à des heures tardives , ça ne peut plus continuer , ça se plaint pic.twitter.com/45Gf0FvWRD
— doni (@donilapute) July 24, 2018
9- l'infirmière , au nom de ses collègues se plaint auprès du médecin chef , qui est aussi directeur de l'hôpital, trésorier, caissier , promoteur immobilier et accessoirement député parlementaire pic.twitter.com/mpcoR47kC8
— doni (@donilapute) July 24, 2018
10 – Le lendemain , le directeur essaye de raisonner le jeune pédiatre en lui conseillant de lever le pied , de venir qu'à 11h du matin de prendre des vacances " Tu es encore jeune amuse toi " lui dit -il pic.twitter.com/YuiAUGXvbT
— doni (@donilapute) July 24, 2018
11 – En vain , le jeune pédiatre continue son rythme effréné et écrit même une lettre au ministre dénonçant les lobbys du fassad à l'hôpital pic.twitter.com/sEmMinbUIO
— doni (@donilapute) July 24, 2018
12 – Alors le directeur emploie la méthode forte , la guerre est déclarée, il place un vigile avec un chien dangereux pour faire peur aux malades , interdiction d'entrer , comme ça pas de malades , pas d'opération pic.twitter.com/Gd0E1B3FJO
— doni (@donilapute) July 24, 2018
13 – Le pediatre ne se laisse pas faire , il organise une manifestation devant l'hopital , avec le soutien de ses malades , "on ne me laisse pas travailler " non au fassad " le jeune medecin y croit , HT facebook , y'en a assez , il va changer ce pays pic.twitter.com/mASWXIyMsx
— doni (@donilapute) July 24, 2018
14- Le directeur contre attaque il porte plainte , C'est pas un jeune médecin né de la dernière pluie qui va nous apprendre à diriger un hôpital, il donne même l'ordre aux infirmières de boycotter les opérations du pédiatre pic.twitter.com/50v3sb7nH3
— doni (@donilapute) July 24, 2018
15 – Le pédiatre décide de balancer tous dans les médias, les petites combines du directeur, les malversations , le tsemsir des infirmières, la tedwira de l'agent de sécurité, le sujet intéresse, c'est David contre Goliath, l'affaire prend de l'ampleur pic.twitter.com/jRAlhcD7GZ
— doni (@donilapute) July 24, 2018
16- Jour J , le jeune médecin arrive au tribunal , avec ses soutiens , les associations , le petit peuple est avec lui, c'est son jour , oui il y croit, on va tordre le cou au fassad pic.twitter.com/LYKp9MdKyD
— doni (@donilapute) July 24, 2018
17 – Quelques heures plus tard , verdict , le médecin sort déçu, il est débouté, le tribunal a statué en faveur du directeur , avec même une peine pour diffamation contre lui , il est dégoûté , Il envisage même d'arrêter la médecine pic.twitter.com/L0oP2y4DmJ
— doni (@donilapute) July 24, 2018
18 – Le directeur se félicite de cette décision, les infirmiers aussi, on organise même un pot pour fêter ça, ils vont enfin pouvoir reprendre le rythme normal de l'hôpital, à savoir 11h – 11h 30 , et donner des rendez vous sur 6 mois , tout est bien qui finit bien, vive le Maroc pic.twitter.com/tt0XMMKkdu
— doni (@donilapute) July 24, 2018
Une histoire intense qui pousse à la réflexion et qui ne cesse d’affoler la toile puisqu’elle est la preuve même que la défaillance du système de santé ne cesse de faire des victimes, parmi les médecins et les patients.
Pour le soutenir, nombreux sont les citoyens qui ont exprimé leur colère sur les réseaux sociaux :
Je suis Mehdi Echafî pour une santé meilleure dans un Maroc meilleur.#mehdiechafî
— ilham aderdour (@yasminelvb) 31 octobre 2017
Ce qui se passe avec #MehdiEchafi est un scandale à l’image de ce qu’est le secteur de la santé publique au #Maroc. Ici, les médecins honnêtes sont abattus sur la place publique pour enrichir les mafias que sont les cliniques privées.
— Majda Avrami (@MajdaAvrami) 26 juillet 2018
Alors que lors d’un entretien accordé à Medactu en Novembre dernier, en réponse à la question : « Quel est votre message aux futurs médecins, parmi eux ceux qui seront affectés à leur tour en périphérie ? »
Mehdi Echafi affirmait :
« Pour répondre à votre question, je me permettrais d’extirper les faits décrits dans l’histoire d’évolution des peuples. Le changement est perpétuel, démarre par une idée institutionnelle positive, s’incorpore dans une volonté individuelle avec effet d’influence sur le groupe et la société.
Si chacun d’entre nous présente une bonne action et la menant dans la cadre d’une stratégie implicative, on pourrait parler de lueurs de changement. Certes, il ne faudrait pas être hâtif et se dire qu’on aboutirait à des résultats dans un avenir proche. Il ne faudrait pas se bousculer par ce fardeau. Mais plutôt garder l’esprit bien éveillé et travailler tout en fixant nos objectifs à court, moyen et long terme. J’insiste sur la volonté individuelle et la prédisposition au changement illuminé et notoire. »
« Ayez la foi et la certitude que notre Maroc a besoin de nous, de nos sacrifices et nos efforts dans un cadre d’une volonté appropriée afin d’aboutir à des résultats dignes des attentes de notre société. »
« Après l’obtention de mon diplôme de spécialité, on a fait courir le bruit comme quoi, je ne me plairais pas dans ma pratique quotidienne et qu’il n’y a rien à faire dans la structure hospitalière de destination, que ça soit de la part des responsables, d’administrateurs ou de confrères. Mais sachez une chose, tout dépendra de votre volonté propre et de la conception à être dévoué pour son travail, son malade et son pays. Très bon courage, je vous attends sur le train du changement. »
Aujourd’hui, dans une vidéo qui fait vibrer le toile et émeut les internautes, il affirme : “Je suis fatigué, je ne peux plus rien faire ! Les responsables doivent assumer leurs responsabilités, au lieu de me menacer de prison après tout ce que j’ai accompli. J’opérais plus de 17 enfants par jour, si le Maroc ne veut pas de moi, j’irai travailler à l’étranger”.
Un changement de discours qui reflète le désespoir d’un jeune médecin, poussé à bout.
Que justice soit faite.
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